Conséquence minérale du délire de quelques milliardaires en mal de romance au XIXème siècle, les jardins de Sintra sont comme les pièces confidentielles d’un gigantesque labyrinthe ésotérique. On s’y perd avec délice, on se croit le passager d’un parc d’attractions pour adultes trop gâtés. Le kitsh n’est jamais loin, mais dans toute chose un sérieux se dissimule. Car le puits qui mène aux grottes est réellement glacial et qu’à chaque pièce on trouve un symbole, une référence antique ou alchimique. Les gargouilles et le diable côtoient l’église immaculée, les fresques chevaleresques ont des amitiés pour les végétations d’Asie.
Pausita à Carmona, sur les conseils de notre logeur de Carthagene. Surprenante forteresse-hôtel qui surplombe la vallée. On voit jusqu’au four solaire. Place du marché carrée et désespérément vide. Gâteaux typiques à la cannelle. Rues blanches et étroites, on est en Andalousie.
Sevilla, enfin. Pour une fois, Airbnb source de lit douillet et d’une douche euphorique. La Cathédrale de Séville et l’Alcazar sont fermées. Ruelles. Salade de poulpe et taureaux empaillés. Ruelles. Pause mini sandwich dans un café spécialisé dans le Chocolate con churros, on est toujours à contre-courant. Hall du marché en forme de parasols géants. Discussion sur l’architecture fonctionnelle. Bar à gâteaux. Pour nous ça sera bière anarchiste et liquor de hierba (ce fameux contre-courant). Discussion sur Dieu. Ajo Blanco, soupe froide locale à base d’ail, d’amande et de lait dans un bar à graillon. Le barman expert en rock et en jazz a été éduqué au rock US grâce aux bases yankees de la région. Il est soit disant incollable sur la musique. Il sera parfait quand on le teste sur quelques morceaux. Vient alors, autour du zinc, un baryton élégant et affable. La soirée est belle.
Gros dodo et desayuno au bar du coin. On achète un pistolet en plastique, va comprendre! Ce sera notre nouvelle mascotte. Seconde visite de Séville. Cette fois-ci, la cathédrale est ouverte. Majestueuse. Prends ta claque de richesse dans ta gueule de pélerin. Vue sur tout Séville.
Retour au Chocolate con churros, pour les goûter ! (cette fois-ci on est dans le bon sens du courant). On déambule et Pierre va chez le barbier (comment faire autrement?).
Plus tard, on quittera la ville pour le tant attendu Portugal. Séville nous a ébloui. Quien no ha visto sevilla no ha visto maravilla . C’est bien vrai (qui n’est jamais allé à Seville, n’a jamais vu de merveille)
Malgré ces pierres suspendues et le soleil présent, les nuits sont fraîches. L’eau gèle pendant la nuit, ça caille sec sous le duvet. C’est dur Antequera. Apres quelques pains à l’huile, typiques du coin, et une église remplie de martyrs, nous stoppons à Estepa pour une grimpette jolie. Les dièdres se font adhérents, la vue est aérienne. Des milliers d’oliviers andalous nous regardent avoir bien froid quand la falaise passe à l’ombre.
Prochaine étape, Marinaleda. Une ville – utopie communiste. Bon, en fait, c’est un village complètement normal! Sauf que les rues se nomment Avenida de la Liberta, le stade de foot Che Guevera et la salle de concert est démesurée pour un village de cette taille. Une large avenue dessert des ruelles orthogonales, façon Western. On y trouve une collection de peintures murales, qui sont au final le sujet le plus intéressant de notre visite.
Des petits coucous qui viennent de partout autour du monde et certains de Notre Dame Des Landes. Une invitation à éteindre la télé et à lutter contre le capitalisme.
Nuit froide encore. Pause à la station-service pour faire le plein de tout (et le vide du reste). Le van a même le droit à un lavage, il est tout beau. Espérons que ça lui permette de réparer magiquement le joint de la pompe à injection qui fuit!
Andalousie, je me souviens des prairies. Et je me souviens aussi de sources chaudes à Santa Fe (rien que le nom, on y est…). A quelques kilomètres de Granada, on trouve cette bourgade. Les teufeurs squatteurs la connaissent pour ses merveilles thermales, et les familles gourmandes la plébiscitent pour ses Pianonos. Ce sont des pâtisseries typiques de la région. C’est gras, c’est sucré, c’est parfait pour un lendemain de cuite. Ci-dessous, une collection phénoménale de gâteaux, les pianonos sont les derniers.
Une journée qui ressemble à une gueule de bois, parfaite pour arriver à quitter ce lieu de libations et de merveilles que fut Granada. La dernière soirée – la plus riche en rencontres, entre un barman bienveillant, un tenancier de vinothèque raffinée, hédoniste et pince sans rire avec sourire en coin, un directeur de Valeo, puant de suffisance, bouffi de certitude et enfin, un couple de chinois qui devient fan de notre duo et de nos aventures (c’en est presque gênant).
L’autre remède idéal pour la tête en cèdre, c’est un bon bain (idéalement dans une bonne auberge). Et nous y voici, à quelques collines de plus, un campement sauvage fait de vans aménagés, de camping cars allemands et de cabanes de récupération. Ce camp entoure deux sources, ravies de mettre à disposition ses eaux chaudes et presque laiteuses. L’ambiance est quasi provencalo-post-apocalyptique , Jean de MadMaxette. Surtout quand arrive, une bonne douzaine de garnements pour qui dimanche midi n’est certainement pas synonyme de repas de famille-gigot-mamie mais plutôt de fin de soirée, début d’after. On nous propose généreusement quelques condiments stupéfiants que nous refusons bien poliment.
On reprend la route vers El Torcal de Antequera. On retrouve quelques montagnes et des formations géologiques exceptionnelles. Laure sieste dans le van pendant que Pierre se perd dans un repère de pierres perchées. Coucher de soleil et lever de pleine lune -échange magnifique.
Après avoir eu l’immense privilège de traverser la province d’Almeria et son inénarrable mer de serres plastique, on arrive enfin sur… Granada!
De l’art de rues, encore et toujours. Et de la couleur! Nous avons vu la maison du Banksy espagnol : El Nino de las Pinturas
Quelques vues des rues de Grenade :
Soirées endiablées de Grenade. Là-bas, pour un verre acheté, on a le tapa gratuit. Et comme on emmenait partout notre matériel à dessin, Laure a tiré le portrait de quelques serveurs. Ils étaient ravis et ils ont gardé les dessins! Verre offert en échange.
Nous sommes fin novembre. Pour notre passage à Valencia, on a décidé de s’offrir une nuit d’hôtel! Douche, vrai lit, repos… Valence est pleine de curiosités architecturales, à commencer par le Musée de la céramique, dont toute la façade est en marbre. Attention, pas toucher, c’est hyper fragile!
L’art pictural n’est pas en reste, on a eu l’occasion de passer devant des graphs fabuleux, marrants, insolites.
La spécialité de la ville? La chufa, ou Horchata ! C’est une boisson sucrée à base de tubercules de souchet (une sorte d’amande qui pousse dans la terre). A déguster dans une Horchateria, avec des beignets mignons nommés fartons!
Vous connaissez l’eau de Valence? Qui n’a d’eau que le nom, d’ailleurs. Prenez de la vodka, du gin, du vin mousseux, du jus d’orange frais, quelques quartiers d’orange, du sucre de canne. Versez tout dans un pichet. Attention, c’est traître! Vaut mieux pas diluer son pastis avec.
On s’est laissés guider par le hasard, pour visiter cette ville. Voilà donc en désordre la fruit de nos découvertes : la place principale (on a oublié le nom), le bras relique de St Vincent, la plage, des tas de tranches de jambon, des boîtes aux lettres – têtes de lion, un arbre géant (un jambon offert à celui ou celle qui trouve de quelle espèce il s’agit)
Evidemment, on est allés rendre hommage à la célèbre cathédrale. C’est impressionnant de foisonnement, il y en a partout, c’est une esthétique de fantasme futuriste comme on en trouve dans les séries des années 80.
La circulation dans Barcelone, c’est pas l’idéal. Alors pour trouver une place pour la nuit, c’est encore pire. On serait bien tentés d’outrepasser toutes les lois, quitte à payer une amande, mais à Barça c’est directement la fourrière (souvenir du premier voyage de Pierre 7 ans avant). Et comme on a pas envie de se faire embarquer la maison, on s’abstient. On finit par atterrir dans un parking souterrain pas trop cher en négociant d’y passer la nuit à condition de partir à 6h pétantes le lendemain.
Barcelone by night et visite du musée Picasso… Inspirant ! On s’attarde devant sa série autour des ménines. Laure en fera une série unique plus tard.
On se fait la tournée des bars à tapas dans le quartier de Sants pour ne pas déroger aux bonnes coutumes. Autant dire que le réveil au beau milieu de la nuit par le gardien de parking n’a pas été facile ! Le type a quand même été sympa et nous a offert un nespresso pour faire passer la pilule. Laure l’a bu par principe.
Et pour les douches, on fait comment? Héhé, piscine municipale pardi! On se croirait en plein été, il fait 21°, c’est magnifique.
Heureusement la deuxième nuit on a pu trouver une place en périphérie et se balader tranquillement dans la ville en métro sans plus se préoccuper de parking et autres réveils forcés. Visite du palais de la musique catalane, contemplation d’architecture…
Au final, on a adoré Barcelone, ville étudiante et délirante. Deux jours, c’était un grand minimum pour s’y promener. Apprécier les petites rues médievales, les fontaines maures, la cathédrale avec des oies au milieu de la cour, des oeuvres de street art, et des arrière-cours de théâtre indépendant transformées en bars nocturnes. Et voilà encore quelques photos, prises dans le vif.
Retour au point de départ, ou juste à côté. En Haute-Savoie! Nous sommes au mois d’octobre, Pierre est rentré du Japon et il faut organiser la suite. En attendant, on se remplit de montagnes et de paysages avec la famille et les amis.
Le Môle, phare tellurique indispensable pour l’orientation de tout bon haut-savoyard :
Session d’escalade avec le foufou australien.
Ascension de la pointe de Marcelly au-dessus de Praz-de-Lys. Attention au vertige :
Ascension des Aiguilles de Leschaux. On est passés par un grand lapiaz :
Et enfin dans les désordre : un pré, une vue du Rhône à Genève, une croix, des fleurs etc… Nous prenons la décision de rouler vers le sud. Cette fois, nous allons passer les frontières au-delà des Pyrénées, direction… le Portugal!
Après cinq jours de randonnée dans la forêt, je finis trempé, le dos endolori et les pieds meurtris. Pour peaufiner mon karma, quelques jours de villégiature ne seront pas du luxe, avant d’entamer une semaine de festivités urbaines.
Kushimoto :
Je prends mes quartiers dans un bungalow proche de la mer, tout au sud de la péninsule du Kii. C’est le point le plus au sud de l’île principale du Japon, Honshu. J’essaie d’étaler mes affaires au mieux. Il pleut toujours depuis 24 heures maintenant. Je prends un bain chaud et bleu avec des canards en plastique… Les émissions TV sont complètement débiles. J’hésite entre consternation et fascination. C’est en résumé ce qu’on ressent quand on visite le Japon…
Ici, on se croirait en Bretagne, mise à part cette chaleur humide et assommante (surprenante pour un mois d’octobre). Sinon, c’est pareil : phares, rochers granitiques, crabes…
J’emprunte un vélo et pars faire le tour de la presqu’île. Je grimpe les marches d’un phare, je saute de rocher en rocher et j’oublie de tremper mes pieds dans l’eau. Pause à une tour d’observation pour constater que la Terre est bien ronde. Le coin est réputé pour la pêche à la baleine. Il y a mëme un panneau explicatif sur la pratique, comme quoi c’est pas grave, c’est une tradition. Dans une boutique, je trouverai des crackers à la baleine.
Je continue mon tour en marquant des pauses aux endroits curieux : un terrain de crocket-golf pour joyeux retraités, un petit port de pêche, un abri anti-tsunami, une vue sur un pont spirale.
Arrêt chez le barbier. C’est épique car personne ne parle de langue commune. Je dis juste « Shotari koto » (coupez un peu). A force de gestes et de dessins, j’obtiens la coupe désirée et de magnifiques favoris. Je ressemble un à vrai gars des années 70. Deux choses m’étonnent : 1. ils ont une machine pour faire de la mousse à raser (et pas de bombe) et 2. je me fais raser le front… Le patron me coiffe avec application. C’est ça qui est fou au Japon : le mec pourrait s’en soucier comme de sa première paire de baguettes de me faire une belle coupe de cheveux. Il sait qu’il ne me reverra pas et il a toujours l’excuse de la barrière linguistique. Mais non, il s’applique comme si c’était LA coupe de sa vie. J’ai même droit à un nettoyage de lunettes aux ultra-sons! Je ressors étourdi de détente et de soin.
Je continue le long de la mer. Je trouve une barre rocheuse splendide. Un type avec une caméra de pro tient absolument à me prendre en photo. Le soleil couchant je dois rentrer. A mon arrivée a l’hôtel, je trouve mes vêtements pendus en train de sécher (alors que je les avais laissés tout bêtement posés dehors). Les proprios m’expliquent qu’ils ont fait une machine et se sont occupés de tout!!
Kushimoto, le lendemain :
Baignade, histoire de dire que je me suis baigné dans le Pacifique. La température est bonne. Je retourne à la barre rocheuse pour mieux l’apprécier. C’est marée basse alors je louvoie dans la roche et que j’observe la vie des crustacés.
Retour à Osaka par le train. Dans quelques heures, les premiers convives et amis de Maxime arriveront et ça va faire mal.
Le reste du récit ne sera que bribes de textes piochés au hasard de mon carnet.
Osaka et les environs la semaine suivante :
Repas avec les futurs mariés et trois bons parisiens dans les arcades de Tenjinbashi Suji. La soirée finit sur une baston entre deux clients : mec contre fille devant le restaurant. Ultra violence dans la rue, à base de genou dans la figure. On est choqués!
Un couple aixois et jeune parent nous rejoit le lendemain. Leur fille d’un an à peine est la star des rues d’Osaka. 54 « Kawai » à la minute.
Une sortie bloc en nature dans les environs avec Max. Occasion pour lui de couper son portable et de souffler un peu du stress du mariage
Enterrement de vie de garçon. Moment pas agréable à mon goût lors de la 1ère partie. Tout d’abord, Hooters, resto degeu et américain avec des serveuses à décolleté. L’ambiance chauffe avec les pintes. On traverse la ville pour aller dans un bar à striptease. C’ est horriblement affreux. On raque pour un « spectacle » et une bière. Une nuée de japonaise en bikini afflue à notre table, pour nous dire « bonjour ». Des gros dégueulasses anglophones les pelotent autant que faire se peut. Moment ignoble de domination masculine par l’argent. Je sors rapidement, davantage saoulé par le spectacle que par les bières. Je me sens triste et anormal.
Au Pure, on danse comme on peut et on boit comme on veut. On rit et on rentre à pas d’heure.
Le lendemain, on vide nos toxines dans l’onsen sur les toits d’un immeuble.
Dimanche :
Le dimanche à Kobe, c’est le jour du mariage On se fait beaux comme jamais. Tous en costard, les pourraves portent mal leur nom. On s’agglutine dans le train pour Kobe. Quartier huppé, restaurant français, beaucoup de fourchettes, cérémonie par un faux prêtre anglais. Maxime est ému et tendu. On sort étourdis de vin, de chaleur et d’émotions. Une bande de trentenaires en costume ne passe pas inaperçue dans Kobe… J’ai l’impression que tout le monde apprécie bien cette notoriété illégitime.
Puis, cocktails et bouffe à gogo. Pause au Glicoman. Cannettes de bière dans la rue. Batteur sur bidon plastique. Concert rock de papys dans pub anglais. Les survivants de la soirée finissent à manger dans un restaurant de Takoyaki (boulette chaude avec du poulpe). Fin au karaoke. On chante à pleins poumons du Céline Dion, du Scorpion et du Nirvana. La seule chanson française qu’on trouvera : « Tombez la chemise ». Hem.
Lundi :
Parc. Captain Tsubasa stadium (Olive et Tom en français). Session truandage de zombies en réalité virtuelle. C’est génial, c’est 2017. Fin au pub, bières et partie de billard minable.
Mardi :
Plage. Château de sable, boomerang (dans les doigts de Toni), gaijinettes qui font le pélican et pépé pervers. Le soir, resto classe a Umeda, avec Polo, le tonton de Max, ancien flic et réservoir d’anecdotes d’un temps révolu à base de pots de vin et de tournage de films spéciaux.
Mercredi :
Sushi train. C’est génial et c’est pas cher. Gavage de sushis. 13 assiettes!
Salle arcade, shopping de derniers souvenirs.
Tout ça finit dans un avion à côté d’un bébé qui ne pleure pas. Joie
Résumé de l’épisode précédent : l’intrépide que je suis s’en va sur les chemins de la montagne japonaise. 1er jour, je deviens serveur de sashimis et le 2eme, j’ai maille à partir avec un macaque. Quelle sera la suite?
Hongu, jour 3 :
Après une nuit glaciale et humide, je me lève aux aurores. Thé noir et marrons grillés à la flamme de mon pauvre réchaud. Je fais un paquetage ultra léger et laisse tout le reste de ma vie dans ma tente. C’est le bon côte du Japon, ça ne craint rien. J’aurais pu même laisser un billet de 10 000 yens posé sur la tente, qu’il n’aurait pas bougé. Traversée de Yunomine Onsen, village thermal orné par une rivière qui sent l’oeuf. De fait, la coutume est de faire cuire des oeufs dans les sources chaudes et d’en faire offrande aux esprits.
Nouvelle portion de chemin sacré. La tradition de cette petite portion de 5 km est de faire le pèlerinage père et fils, enfant sur les épaules, sans toucher terre. J’imagine la situation du père qui glisse sur une racine humide et tombe avec l’enfant. Honte sur 9 générations et seppuku (suicide rituel des samouraïs) de rigueur !
Passage par le lieu originel du temple dans le lit de la rivière (et donc forcément détruit par des inondations, bizarre..) et par la plus grande arche (Tori) du Japon (du monde?))
Passage obligé par le Kumano Hongu Taisha, but du pèlerinage. Beaucoup, beaucoup de monde, mais c’est très beau. Dans l’endroit le plus sacré, il y a une cérémonie (mariage?) et des mecs avec oreillette aux quatre coins (des Yakuzas?). Dans ce lieu, on vient pour laver son âme des âneries de la vie précédente et de la présente.
Je reprends la route à contresens de la majorité. Je fais marrer ceux que je croise avec mon gros sac, ma coupe de samouraï et mon bâton en bambou. Beaucoup me posent des questions, me demandent d’où je viens. Au début, ça me fait marrer et après je m’esquive vite. On sort un peu de la forêt pour une zone plus agricole. Je croise une bande de singes qui harcèle les toits des fermes. On trouve des cabanes avec vente de prune salée en libre service avec la tirelire à côté. J’en achèterais bien si ça n’était pas aussi infect. Je croise un serpent, que je soupçonne d’être un mamushi (vipère mortelle du Japon).
Puis finalement, Hoshinmon oji. Petit temple final de ma visite. Je recroise le couple qui m’avait aidé deux jours auparavant (« Lucky Boy »). On discute et on se prend en photo. Je mange mon bento avec un nippon de circonstance. Puis je digère et attends le bus en dessinant le temple.
Retour au campement et départ pour une auberge ce soir. Sur le chemin, j’utilise une passerelle. Elle me parait peu utilisée, au vu du nombre d’orties présentes dessus. Au milieu, je comprends que les écriteaux en bas devaient vouloir dire « Danger ne pas utiliser ». ça serait bête d’avoir évité les ours et les serpents mamushi, pour mourir sur une passerelle. Heureusement, mon oeil secret me protège.
Auberge agréable et traditionnelle. De l’autre côté de la rivière, que je vois depuis ma fenêtre, il y a un onsen en extérieur. Je m’y délecte à la tombée du jour (ou de la nuit).
Utegawa, jour 4 :
Au début de l’étape du jour, l’ambiance est superbe. Je longe la rivière et les bords fument à cause de l’eau thermale qui en sort. ça bouillonne même par moment.
La matinée sera une belle ascension dans la forêt. Que des gaijins (étrangers), j’hallucine. Arrivé au camping final, je ne trouve personne. Je pars à la recherche aux informations. Je trouve deux pêcheurs qui pique-niquent, ils comprennent rien à ce que je dis mais m’offrent … une bière. Je tourne dans les parages et je trouve un spot à barbecue, mais façon japon. High Tech. Les petits coins pour faire le feu, des petits pots à disposition pour déplacer les charbons vers les tables. Et sur ces tables, il y a un creux intégré pour pouvoir barbecuter peinard assis. Mise en place de ma couche, j’en profite pour faire une vidéo.
Place au onsen, dormais quotidien. Je rejoins les convives dans le lodge, qui est aussi la réception du camping, un hôtel, et une ancienne école. 80% de gaijins. L’après-midi, l’ambiance est étrange. Tout le monde rôde dans le village alors que chacun sait qu’il n’y a rien à faire. Tout le monde se connaît car on s’est croisés sur le chemin mais personne n’a envie de se parler. En tout cas pas moi. Je suis hors sujet. Le seul à dormir dans une tente, le seul tout seul, le seul qui mange des ramens deshydratés et pas le super plat du jour… Bref, je mange mes nouilles en compagnie du couple « Lucky Boy ». Je commence à comprendre que Madame Keiko est malade des bronches et fait le voyage pour guérison. J’en demande pas plus.
Kugochi, jour 5 et dernier jour :
Réveil très tôt car l’itinéraire du jour est difficile. A 6h, une sirène retentit dans le village. C’est un exercice et pas un missile (dixit le type de la réception). Ce même type qui me trace un plan du village AVEC UNE REGLE !! pour m’expliquer comment prendre le bus.
Revenons au départ, il fait nuageux. Je pars pour la dernière et la plus dure journée de trek. 16km et 1300m de dénivelé. ça se déroule bien je gère mon rythme et la pluie. Au début gentille, puis de plus en plus énervée. ça commence comme une petite blague puis ça devient une humiliation persistante. Quelques heures de marche, puis une pause qui est à peine agréable car tout est mouillé.
Giono écrivait que le plus dur était de marcher la nuit avec ses soucis. Je pense qu’il ne devait pas connaître marcher sous une pluie battante, chargé comme une mule, ambiance brume façon Silent Hill, sur une montagne nommée « La demeure des morts ». Glups.
Finalement, j’arrive à Nachi San. Je lâche un bon « Yata » (j’ai réussi) des familles. Visite des temples humides, difficile d’y prendre goût. C’est pourtant superbe. Je ne ferai même pas l’effort d’aller voir la cascade, la plus haute de tout le Japon.