Ô Languedoc

A Castres, nous avons assisté à une parade militaire de grabataires. Éclusé une librairie-papeterie pour ne finalement rien acheter, bu du Cacolac en critiquant tout ce qui passait et fini par mettre les voiles en lâchant au passage un coup de klaxon, désormais coutumier de la manigance. Et admiré les maisons penchées au dessus de la rivière, sorte de sous-Amsterdam languedocien.

Avons roulé sans pause, jusqu’au soir et jusqu’à ce que la route s’arrête, tout naturellement, en haut d’une colline. Nous arrivions dans la cour d’une maison, devant une tablée joyeuse en train de souper. Ils nous ont accueillis avec sourire et nonchalance, et nous ont laissés passer la nuit dans leur jardin (grand!)

Pour la journée d’anniversaire de Pierre, il allait sans dire que nous allions faire un peu d’escalade. Dans une gorge des plus fréquentées – mais après tout, pourquoi pas, passer son mois d’août en France profonde, avec le sentiment de se faire une virée par le métro de Tokyo?

Bien avisés par les conseils de l’officieuse de tourisme d’un de ces plus beaux villages de France ™ , nous échouons en haut de la montagnette , près d’un hameau nommé Douch. Plus précisément, on se collera près de l’église excentrée et de son cimetière. Nous avons demandé la permission aux morts pour dormir auprès d’eux. Qui ne dit mot consent.

Promenades, les jours suivants. Parfois le paysage en venait à changer tous les cinquante pas, nous étions en train de passer par les niveaux et les mondes d’un jeu vidéo.

Et puis juste avant d’atterrir dans la Drôme, nous sommes passés par Celles. Village rescapé, tout petit dans son désert de pierre rouge (dite ruffe). L’édification d’un barrage, dans les années 70, l’avait condamné à muter amphibie. Histoire de mieux irriguer la sacro-sainte vigne nationale. Mais maladresse des ingénieures ou miracle des lois lacustres, Celles est demeuré bien au-dessus du niveau des eaux, à quelques mètres du rivage. On vient de partout se tremper dans le lac de Salagou et s’accrocher, baigneurs et baigneuses-oiseaux, sur les cimes des arbres qui dépassent encore. Village déserté, donc, mais faisant actuellement l’objet d’un projet de réhabilitation. Futures habitantes et habitants sont cordialement invités à venir s’installer pour gratis, en échange de quoi, ils et elles s’engagent à restaurer leur habitat et à occuper des postes tournés vers le savoir-faire et les techniques de l’environnement. A bon entendeur…

Toulousie et les environs

Après ce tourbillonnant séjour en Quercy, cap sur Toulouse! Derrière nous la colline verte qui fait reposer les châteaux d’Eric et devant nous les vallons creusés par le Tarn ou la Garonne. Alors, on prend les brides de notre monture de fer et de gasoil, et on le traine à travers la campagne et ces villes bien typiques du sud-ouest :

Alors, on a vu la Penne d’Agenais, avec les ruines du château de Richard Coeur de lion et un lieu de culte majeur dédié a la Vierge.

 

Plus tard, on fera halte à Villeneuve-sur-Lot, charmante sous-préfecture du Lot. Le ciel y est couvert d’une constellation de ballons dirigeables. Pour cause, une compétition de montgolfières se déroule à quelques kilomètres.

 

On passera par la ville non-natale de Pierre, Agen. Occasion de voir une copie de Gaudi, de vieilles pierres et une porte de garage qui nous a tape dans l’œil.

 

En traçant la route a l’ouest, en direction de la méditerranée et surtout de Toulouse, on trouve une cité plantée près sur la jonction du Tarn et de la Garonne. Le massif central y rencontre aussi les Pyrénées. Leurs eaux mélangent les éléments granitiques et calcaires. Pays plat fait pour la circulation fluviale, c’est normal d’y trouver des canaux. Le plus fou d’entre eux enjambe le Tarn!

 

Moissac, outre son muscat, est connu pour son abbaye. Il semblerait que ce soit la plus ancienne de France, d’après les historiens. Dans la cathédrale, on trouve des sculptures de bois peint, d’un réalisme saisissant. Dans la cour abbatiale, des sculptures uniques parcourent toutes le long de la travée. Il semblerait que ce soit un exemple de l’art moyenâgeux.

Plus au sud, le long de la Garonne, il y a Montauban.

 

Finalement, on arrive en terre promise. Toulouse, ses bières bonnes, ses briques roses et son Florent Paris fait de moustache et de créativité. On découvrira le circuit bending grâce aux doigts habiles de notre ami musicien explorateur. Cette pratique consiste à détourner des objets électroniques sonores en allant directement trifouiller dans leurs circuits imprimés. Pendant notre séjour, Hors Sujet a bricolé des K7, un lecteur de cassettes, un discman.

Après un tour a Emmaüs, on rapportera des jouets pour enfants. Aussitôt démonté, on fait des court-circuits pour trouver ce qui commande la vitesse. Ça fait accélérer les voies, donne des effets bizarroïdes et caverneux et on rigole.

 

On a aussi vu des statues inertes et vivantes, de l’architecture urbaine qui peut avoir une certaine esthétique, une poutre réparée a la brique!!, la plaque la plus WTF jamais vue, des gens très polis :

des canaux, des collines, des arbres…

Blue Fox Coffee

Olala mais c’est quoi ce nom? Sommes-nous passés du côté Starbucks de la force? Eh bien c’est tout l’inverse, chers incrédules. Derrière ce nom aux sonorités anglo-saxonnes, se cache un café associatif dans le centre d’Agen (et pas d’Angers).

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Il y a des livres à donner à l’entrée, une grande bibliothèque remplie de jeux et de livres (il y a même un tricky bille ;o). Ces items sont à consulter sur place ou bien peuvent être empruntés à la manière d’une bibliothèque.

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Sur le côté un tableau à idées. C’est là-dessus que l’heureus(e) auteur(e) notera sa ou ses suggestions. Ensuite, chacun(e) confirmera d’une coche ce qu’il ou elle préfère. Les idées les plus plébiscitées verront le jour lors d’une soirée ou après-midi. Fantastique! Il y a déjà eu des soirées jeux, des ateliers mosaïque (les créations sont accrochées dans le café, d’ailleurs), soirées anniversaires (en août, quelques trinqueurs-euses d’un soir se rendant compte que leurs dates de naissance sont très proches, décident de célébrer cette coïncidence spatio-temporelle, tous ensemble).

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En face de la bibliothèque, il y a un piano et d’autres instruments de musique à disposition.

A la carte, moult thés et idées de cocktail à base de café. Les gérants sont très aimables et peu avares de leurs mille bons conseils et bonnes vibrations (!)

C’est un lieu gratuit, ouvert à tous et déclaré d’intérêt général, il y a peu. « Vital » et « un lieu qui manquait à Agen », voilà ce que nous disent en somme les clients de circonstance. Le public est varié : mère de famille, jeune bidouilleur, trentenaire à la limite de la marge. Toi aussi, visiteur ou habitant d’Agen, nous te conseillons la petite parenthèse au Blue Fox Coffee (en plus y a du wifi).

Le Quercy

Entre les virées en 2cv et le montage d’une maison en bois, nous profitons de nos après-midi. C’est le bon plan du wwoofing chez Eric : on bosse le matin et l’après-midi c’est quartier libre. Alors on visite cette belle région faite de gras de canard et de vin puissant.

 

Tout d’abord, le festival du Père Quepas à Montaigu en Quercy, pris en main par le collectif des AJT du Q. Coïncidence superbe, la semaine de notre présence un petit festoche est organisé. Sorte du bal du village surboosté croisé avec des délires d’artisans sculpteurs. Pendant une semaine, des tailleurs de pierre, charpentiers, ferronniers d’art,… se rejoignent toute la journée et travaillent sur un oeuvre pharaonique. Le but est de présenter la création le dernier soir, clou du spectacle de la semaine festive. C’est un marathon d’artisan, un artisanathon?

Entre les journées de travail, il y a des soirées de fête qui s’intercalent. L’ambiance est top : fauteuils dehors, toiles de navires au ciel et pluie fournie qui n’empêche pas les transis de danser. De très bons groupes, DJ Kosmo Pilot qui assure tous les afters, des repas végé délicieux servis par des mecs en blouses à fleurs.

 

Fidèles adorateurs du totem carnavalesque, grandissant chaque jour, nous avons été présents trois soirs sur 7. Et voici que vient le dernier soir, le plus important. Le soir où il y a le plus de monde aussi, c’est samedi soir. Les créateurs ont du retard, encore en train de fignoler et de souder à 23 heures alors que la présentation est prévue à 21h. La tension monte, de plus en plus de monde s’agglutine autour des rubalises. On se bouscule un peu pour assister au montage et comprendre ce qui se trame. La sculpture doit mesurer 3 ou 4 mètres de haut. C’est une figure de bascule. D’une part, l’oiseau (articulé, siouplait) et de l’autre, le nid et son oeuf en pierre massive. On nous souffle que le tout pèse 8 tonnes. Puis, attention, silence et spectacle. Un manitou avance et tend son bras télescopique pour monter le nid de géant. Toute la partie délicate réside dans la mise en équilibre des deux parties. Des tiges d’acier retiennent l’ensemble. On nous fait reculer, dans la lumière des spots, la foule retient sa respiration… La balance se met en tension, la structure craque, les mâchoires se serrent et soudain l’une des tiges d’acier cède avec un claquement puissant. Déception ambiante. On se regarde, on ne sait pas trop… Puis la musique reprend. Tant pis, ils feront mieux l’année prochaine.

 

Les concerts commencent et la fête continue! On en gardera tout de même un bon souvenir.

Autre joyeux souvenir: Tournon-en-Agenais, bastide de la région d’Agen. On y goûtera le calme et un thé à l’amande. Laure écrit, Pierre dessine les ruelles et ils sont contents de leur travail.

 

Le bruit de mobylettes nous sort de cette concentration et jure avec le décor. A y voir de plus près, c’est une bande d’aficionados de la mobylette (oui ça existe), avec des brelles toutes belles… On repasse à Tournon quelques jours plus tard pour la (célèbre?) foire aux tourtons, sorte de tarte tatin agrémentée de jolis bigoudis faits de pâte feuilletée caramélisés au sèche-cheveux. C’est plus cher que ça n’est bon.

 

Depuis quelques temps, nous sommes redevenus des lecteurs assidus. Et ce qui tombe drôlement bien, c’est la présence, dans chaque ville, chaque bourgade, de ces petites cabanettes à livres. Alors on y trouve un peu de tout, et sans doute plutôt moins que tout, dans la mesure où, servant de débarras, ces petites boîtes se font souvent le réceptacle des lectures devenues inutiles, encombrantes, voire honteuses. Au hasard : des manuels de première années de fac de droit, des classiques incontournables des années collège, un bonne proportion de collection Arlequin, enfin de petites horreurs comme le manuel du paradis fiscal, le Cercle des gagnants (vous expliquant comment le rester puisque manifestement vous l’êtes déjà), ou bien la parfaite marche à suivre pour manipuler les hommes. On se régale. Et parfois même on trouve véritablement de quoi se mettre sous la dent, moyennant un échange glané sur la boîte à livres précédente.

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Et puis dans le Quercy on y aura grimpé (forcément), vu Fumel, ville vraiment pas top, bu beaucoup de vin de cahors, assisté à un marché gourmand et musical, et mangé un duck burger. On se souviendra des séances de cinéma du mercredi chez Eric (avec le groupe électrogène en guise de fond sonore), du vent d’Autan, de Montaigu en Quercy, des prunes et des mûres.