La Ferme de Keréré

Comme on ne faiblit pas, le maraîchage est de mise, y compris loin de notre itinéraire.

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Nous avons passé une semaine dans le Morbihan, à 200 mètres des côtes atlantiques. A Locmariaquer, exactement. C’est une ferme avec une jument de trait (Aza) et deux veaux. Mais aussi un cochon, des poules, des oies, des chiens, des chats …

Richard nous y accueille. Il a notre âge, il s’occupe seul de la ferme et chaque jour des voisins, amis, stagiaires ou woofers viennent lui donner un coup de main.  Il fait pousser sous serres et en extérieur. Pendant le temps où nous l’avons accompagné, nous avons planté et récolté betteraves, fèves, tomates, oignons, radis, courgettes, concombres, tournesols. Il pratique la culture permanente sur butte. Ce qui fait que nous avions de larges plate-bandes surélevées, parsemées de légumes divers, placés en fonction de leurs affinités mutuelles.

Nous avons appris à créer des buttes, avec paillage, fumier (de boeuf ou de volaille comme le bouillon), calcaire, granulés.  Il y a un ordre précis, qui n’est sans doute pas celui que vous venez de lire. Richard est très fier de sa production bio et sans pesticide ajouté. Nous apprenons aussi beaucoup de choses sur la région, à commencer par le fait qu’il n’y a pas eu de vraie pluie (15 jours d’averses) à Locmariaquer depuis deux ans. Ce qui n’est pas sans poser problème pour une terre humectée d’eau salée. La ferme possède aussi une serre de semis, ça permet de faire ses propres plantons. Ainsi, Richard peut être plus indépendant vis à vis de ses fournisseurs et aussi faire commerce de plantes et de fleurs aux beaux jours. De quoi améliorer le quotidien.

Mais la ferme de Keréré, c’est surtout beaucoup de monde qui gravite. A commencer par Arnaud, l’inséparable acolyte. Ami bienveillant, il est toujours prêt à sortir les bêtes, faire des boutures ou déboucher une bière. Si on veut connaitre les horaires des marées, c’est à lui qu’il faut le demander, car il les a toujours dans sa poche. On trouvera Maelle, la voisine qui vient de lancer sa ferme de plantes aromatiques. Elle passe donner un coup de main le vendredi matin en échange d’un panier de légume. De l’échange social et local, sans passer par une AMAP. Il y a aussi Aurore, qui possède quelques chevaux pas loin, Benoît, qui effectuait son stage, Agathe, qui manie vaillement la fourche et pratique la méditation à base de désherbage de liseron, Emilie, la woofeuse-skipper… Et nous avons aussi eu la chance de rencontrer la famille Fantastic. 2 parents et 4 enfants très énergiques, vivant tous dans une caravane. La discussion commence vite et les points communs affluent. Ils ont le projet de monter une ferme de maraîchage et sont à la recherche de terres. Leur prochaine destination est le Maroc. Ils sont très décroissants, proches de la Terre, et ils font l’école aux-mêmes à leurs enfants.

Ici, tout rappelle la mer et la Bretagne : le drapeau breton, les pirates, la musique… bretonne forcément, les ballades en bateau vers les îles isolées. Le premier matin, nous sommes réveillés par un hélicoptère qui tourne auprès de la côte à la recherche de naufragés. Il faut savoir qu’à l’entrée du golfe du Morbihan, le courant est exceptionnellement puissant. Ce serait le 3ème courant le plus puissant d’Europe.

Les journées sont organisées de la sorte : début à 8h30, travail jusqu’à 13h30, puis apéro et déjeuner. Après, nous avons quartier libre. C’est génial, ça nous laisse plein de temps pour faire les touristes, vive le woofing.

Nous sommes allés bien sûr visiter Carnac ( un site megaltihique majeur bien encadré derrière ses jolis grillages de lotissement banlieusard), et puis la forêt de Brocéliande.

Nous ne savions pas que la région pullule de menhirs et autres dolmens. A tel point d’ailleurs qu’on en trouve dans les jardins, derrière les maisons, dans les caves (sous quelques couches de béton car de telles découvertes ont vite fait de classer le terrain comme non-constructible).

On a arpenté de long en large l’île aux Moines et vus ses beaux paysages.

On a découvert le vieux port breton de St Goustan, situé dans un ria.

Et on a visité Rennes, le parc du Thabor et sa roseraie splendide.

Et quand nous ne sommes pas les genoux dans la terre ou les yeux dans le granit, nous apprenons à ouvrir des huîtres plus vite que notre ombre (enfin, on s’entraîne encore), nous goûtons du chuféré (jus de pomme + miel fermenté – sorte de cidre puissance 4. attention ça réchauffe) et des bières locales au sarrasin. Ne surtout pas faire mentir les traditions locales!

On repart après une semaine seulement, mais en ayant appris énormément sur le métier. On se dit au revoir, en se disant qu’on reviendra mais pour une fois ça n’est pas une politesse, on y croit vraiment. Ce n’est pas un patron qu’on quitte mais ce sont des des amis, avec qui nous reviendrons bien volontiers manger des galettes et boire une Telen Du à la santé de la ferme de Keréré!

Anjou

On quitte notre plan de route et notre chère maison roulante. Avion, pour changer.

C’est un petit détour pour la douceur angevine, la chaleur familiale et les vins de Saumur. Pays tout à fait charmant, peuplé de maisonnées cubiques à frises et frontons, qu’on dirait découpées dans des châteaux puis disposées çà et là parmi des champs submergés de coquelicots, de renoncules et autres menthes sauvages. On y croiserait des poupées. La Loire est à deux pas, qui nous fait comme un avant-propos de la mer (que nous verrons quelques jours plus tard…).

La Vésubie

Chamboulement dans nos plans, parce qu’il y a un imprévu. Un peu comme le maraîchage en fait. On fait des plans, on prévoit des cultures et des récoltes. Et puis c’est le soleil qui manque ou bien le tracteur qui est en panne. Alors on change d’histoire. Pareil, pour notre voyage. Avant de dévier un peu du cours de l’aventure, on profite de la vallée de la Vésubie.

C’est beau la Vésubie. On apprend le nissart. On goûte la torta di blea et la pluie méditerranéenne. On observe les chamois qui prennent la pause – familiers. On mange de la socca et on boit de la bière à la socca. On se gave d’escalade, de vtt et de randonnées. On n’oublie surtout pas d’évoquer la grandeur d’âme d’Eric Ciotti. Natif de la vallée. 

 

Les réponses aux questions existentielles qu’on se pose

Alors voilà les réponses décisives aux questions fondamentales posées précédemment.

  • Comment fait-on le plein avec un tracteur?
    • Les agriculteurs peuvent acheter du carburant détaxé. Un livreur vient remplir une citerne dans la ferme. De fait, pas besoin pour eux d’aller au Super U faire le plein. Le fuel est donc à disposition directement sur place.
  • Comment fait-on du miel de sapin?
    • Le miel de sapin est en fait du miellat. Celui-ci vient de pucerons qui se nourrissent de la sève du sapin. Les abeilles traient ces insectes au lieu de butiner. Il n’y a pas toujours de pucerons. La production est très aléatoire. On dit que c’est en général, une fois tous les 3 ans. Donc, ce miel n’est pas du simple degueulis d’abeille, mais bien du degeuli de traite de pucerons. Peu importe, c’est très bon et puissant en goût.
  • Quelle est la différence entre chamallow, marshmallow et guimauve?
    • Marschmallow : nom anglais de la guimauve / Guimauve : nom français des marshmallows / Chamallow : nom donné par Haribo à la guimauve.
  • Pourquoi les vieux marchent avec les mains dans le dos et aiment regarder les travaux dans la rue?
    • On n’a toujours pas la réponse à ces deux questions passionnantes. Concernant les mains dans le dos, on aime l’explication de Thomas qui dit qu’ils savent pas quoi faire de leurs mains. Laure propose l’hypothèse suivante : Étant donné qu’ils sont courbés, Gustave, ils ont les bras ballants. Ils les mettent dans le dos pour ne pas les laisser trainer. Aussi, le fait de mettre les mains au niveau des lombaires permettrait un redressement salvateur et bienvenu de la colonne vertébrale. ». On propose d’aller interroger les personnes que nous voyons faire ainsi et mener notre enquête.

Merci à nos 4 participants.

Thomas : Tant que tu ronfles pas et que tu perds pas tes chaussures dans un fossé, on t’accueille.

Coralie : Si vous voulez tenter l’aventure à 4 dans le van + 1 enfant en bas âge, viendez!

Julie : Quand on revient à Eourres, on repart en bivouac ensemble

Lucas : On te recontacte pour ton plan de château abandonné en Espagne, ça nous changera du van.

Les lamas du miradou

Fuyant la côte et les métropoles azuréennes, on monte les lacets. La vue devient splendide et la mer nous accroche toujours un peu. Direction la ferme des Lamas. La pluie, le maître des lieux (appelons-le C.) et Vincent, l’autre woofer, nous accueillent, dans un cadre un peu déroutant. Pour cause, la maison est une ruine, suite à un incendie survenu quelques mois plus tôt. Une petite cabane cosy a été construite à la hâte pour que C. puisse rester près de ses lamas.

Premier contact avec les lamas, odeur de pop-corn au foin mal digéré. Reniflage de visage et de bonnet. On nous conseille de nous laisser faire car « il faut parler d’âme à âme » aux lamas. 7 quadrupèdes andins, en totale liberté (dans l’enceinte grillagée de la propriété). Ce qui n’est pas sans poser un léger problème de cohabitation parfois. Difficile de déplacer des poutres de plusieurs kilos quand un lama outré vous bloque la route.  Doudou-Felix est le plus curieux et le plus imprévisible d’entre eux. C’est un peu notre bully à nous. Il a craché plusieurs fois sur Laure ( » il est territorial c’est tout ») et mordu le pied de Pierre (« c est amical »). On apprendra plus tard qu’il a mordu un autre woofer jusqu’au sang la semaine précédente.

Notre activité principale pendant notre visite est de construire une salle de bain pour les woofers entre deux remplissages d’auge de lamas et ramassage de foin. Difficile de mener notre tâche à bien entre la désorganisation, le froid, le manque de matériel et la présence continue des lamas…

Le premier jour, nous faisons une séance de yoga. Malgré le froid, nous arrivons à nous détendre et à méditer. Révélation lucide pour Pierre avec les sonorités du gong et des bols tibétains ==> « Je peux grimper du 7b! »  La falaise en décidera.
S’en suit notre première nuit à 1600m dans le van avec bonnets et collants. Réveil sous la neige.
Après quelques jours, nous marchons à la découverte des environs. Nous y trouverons une station de ski qui semble avoir subi une zombie apocalypse. Nous ferons l’ascension du Mont Authion – le 2000m des Alpes le plus au sud -, vue sur la mer magnifique et défilé ininterrompu de ruines de casernes – vestige des tensions franco-italiennes de la fin du XIX ème siècle. La nature ici est sauvage. On verra beaucoup d’oiseaux migrateurs, de rapaces et de chevreuils. Mais aussi des preuves du passage de loups, sous la forme caractéristique d’os rongés, laissés lisses.
De retour au col de Turini, nous sommes surpris par les bruits de moteurs et des foules arrêtées sur le bord de route. Aie nous sommes en plein sur le passage du rally de l’Escarene. Il y a beaucoup trop d’humains, de vacarme de rupteurs. On ne se sent pas tout à fait dans le move mais ce contraste est amusant.
Quelques festivités pour le dernier jour. Un barbecue (de la viande et de la bière!!) est organisé pour l’anniversaire d’un ami de C.  Du djembe et des cloches tibétaines, une explication de fonctionnement d’une hutte de sudation, saupoudrée de spiritualité mexicaine, un japonais perdu et incompréhensible qui se fait cracher dessus par Doudou-Felix (et qui n’a toujours pas compris que ce sont des lamas et pas des chameaux), une session de musique mystique qui nous fait prendre la poudre d’escampette. Un au-revoir très poli au maitre des lieux, aux invités. Nous sommes presque loin… Portail fermé. Il faudrait faire demi-tour, aller demander les clés. Mais n’y tenant plus, nous escaladons le grillage précipitamment . Vive la liberté!

La côte d’Azur

Après avoir fait une halte à Aix en Provence pour faire le plein d’amitié, de fruits et légumes frais et d’internet, nous continuons notre route vers la cote d’Azur.
Arrivée sur la plage, les pieds dans la mer. Frejus-Port, un matin, beaucoup de retraités et un couple d’anglais (retraités aussi). Style improbable, la mer est belle et fière.
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Magnifique route de la corniche de St Raphaël à Cannes. Maisons Walt Disney à mi-chemin entre la petite sirène et Aladin. Décor de cinéma.
Bien vite rattrapés par l’urbanisation peu engageante du 06 . Nous avons fait une pause dans Nice pour manger un pan bagnat et acheter du matériel de montagne.
La pluie tord le cou à la croyance populaire selon laquelle il ferait toujours beau dans le pays niçois. Cela n’arrêtera pas les touristes en goguette que nous sommes.
Nous voilà à Luceram, joli village médiéval à qui la brume donne des airs de roman-pissaladiere. On apprendra plus tard que c’est un haut lieu de la crèche. Du genre battle de crèche, avec santons grandeur nature et décorations léchées. Peu de monde à cette époque, nous croiserons seulement un chat amical au premier abord, un couple enlacé devant le chantier de leur maison encore en rénovation.

Arrivée le lendemain au col de Turini pour faire connaissance avec les lamas – notre prochaine étape de woofers

Les questions (pas si) futiles qu’on se pose

Cette fois-ci, un article un peu spécial. On vous fait part des questions qu’on se pose quand on se promène ou quand on bêche les rangs de carottes. Celui ou celle qui donne les meilleures réponses en commentaire (ou les plus poétiques), gagne un séjour dans notre van aménagé. Interdit de regarder sur wikipedia

  • Comment fait-on le plein avec un tracteur?
    • Et oui, après tout, avez vous déjà vu un tracteur à la station service?
  • Comment fait-on du miel de sapin?
    • Les sapins ne font pas de fleurs. Difficile pour les abeilles de les butiner, dans ce cas. Pourtant, on fait bien du miel de sapin.
  • Pourquoi les vieux marchent avec les mains dans le dos et aiment regarder les travaux dans la rue?
    • Avouez, vous avez déjà remarqué.
  • Quelle est la différence entre chamallow, marshmallow et guimauve?